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Cueillies çà et là

1. Les Lobi (Burkina Faso) aiment sculpter des animaux. Sous leurs doigts habiles naissent des lézards, des serpents, des lapins, des chats, des chiens, des autruches et autres oiseaux. Ce riche bestiaire sculpté comprend de nombreuses marionnettes articulées. L’une d’elles, un chien, est conservée dans la collection d’André et Afo Guenneguez (s.d. : 197). La présence de ce canidé en bois est d’autant plus significative que les Lobi consomment la viande de cet animal.

 

2. Les Lobi savent également tailler des personnages anthropomorphes. Un buste fortement érodé faisait partie de l’ancienne collection du Musée national des Arts Africains et Océaniens à Paris. Cette sculpture en bois a été exposée en 1972/1973, à l’Orangerie des Tuileries à Paris. Sa reproduction illustre l’ouvrage sur l’art africain de Pierre Meauzé (1967 : 158-159). L’existence des orifices (traces laissées par un système d’articulation) et leur usure indiquent clairement  qu’il s’agit d’une marionnette possédant un riche passé théâtral.

Actuellement, quelques spécialistes doutent de l’appartenance ethnique de cet objet. D’après son style, ils jugent qu’elle provient plutôt du Mali, ou que son facteur était d’origine bambara ou marka. Il est certain que les guignols aiment voyager : toute leur histoire le confirme. En 1974, les marionnettes étrangères, probablement maliennes, défilaient à Ouagadougou, lors d’une marche de soutien politique au président du pays. Nous tenons cette information d’un témoin oculaire, M. Debert, directeur d’un Centre culturel français en Afrique, rencontré dans les années 1980, au Centre d’études africaines à Paris.

 

3. Des marionnettes voyageuses ! Le collectionneur André Blandin nous a signalé une marotte acquise, il y a une quarantaine d’années, à Bobo-Dioulasso. Taillé dans du bois, le personnage mesure environ 22 centimètres. Il est habillé de longues fibres de raphia (celles-ci, accrochées au pourtour du visage, font penser à la fois à une longue barbe et à un vêtement en forme de cape). Ses yeux sont imités par deux cauris, sa mâchoire inférieure articulée, son crâne coiffé d’un bonnet.

 

Selon son vendeur, cette marotte proviendrait de la région de Banfora (Sud Ouest du Burkina Faso), fief des Gouin. Toujours est-il que le collectionneur français lui trouve  une certaine ressemblance avec le style marka (Mali), et qu’un spécialiste gouin (à qui nous avons demandé son avis) pense  qu’elle était utilisée chez ces derniers, mais confectionnée par un Sénoufo. Ce qui est tout à fait possible, vu le voisinage de ces deux peuples.

 

4. On les appelle les marionnettes « métisses » et elles sont relativement récentes au Burkina Faso. C’est une catégorie hybride en plein essor, en majorité à fils, qui puise surtout dans des ressources extérieures et demeure éloignée des traditions locales. Les « métisses » ressemblent à toutes les autres marionnettes de l’Afrique actuelle, la seule différence consiste en leur sculpture plus ou moins artistique et leur articulation plus ou moins techniquement réussie. 

 

5. La crèche qui est arrivée au Burkina Faso avec l’évangélisation est une manifestation de l’acculturation coloniale. Joliment sculptés par les artistes natifs du pays, ses santons font le tour du monde grâce aux touristes et aux concours internationaux de crèches.

© Anita Bednarz 2020
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