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evolution des pratiques

 

Du traditionnel vers le spectaculaire

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La pratique spectaculaire  de la marionnette au Togo et au Burkina connaît une évolution significative depuis l’affirmation des politiques culturelles africaines après la décolonisation.

 

Coincés par toutes sortes difficultés, conscients de la richesse du patrimoine culturel, séduits par les apports d’autres cultures, les artistes cherchent à affirmer leurs identités. Vouloir sortir des éléments de la culture traditionnelle comme l’ose Danaye Kanlanféï, l’oblige à vivre  de véritables crises intérieures quand il est confronté à ces « sacré(s)- secret(s) », (jamais totalement sacré ni secret), englués dans la convention de la tradition. Si le milieu social et culturel fournit au créateur le terreau à partir duquel il crée ses œuvres d’art,   c’est lui qui choisit la manière de répondre aux stimulations que la société lui propose. L’imaginaire, en effet,  ne fonctionne qu’en se moulant dans les cadres fournis par la société mais propose d’autres démarches conscientes, qualifiées quelquefois de peu authentiques.

 

Les rapports que cette société entretient avec cet art montrent qu’ils en sont souvent l’expression. Encore pénétrées de mysticisme et de magies, les racines religieuses et les influences extérieures ne les ont pas encore détruites. Les éléments spirituels dominent les éléments matériels. Les valeurs religieuses et sociales survivent aux valeurs artistiques. Pour une  grande partie rurale de la population, le dialogue n’est pas coupé avec le numineux[1]

 

C’est toujours la même réalité éprouvée comme transcendante [2] dont l’imaginaire semble exclu parce qu’il  ne fonctionne qu’en se moulant dans les cadres fournis par la société dont les divers niveaux économiques, politiques, idéologiques,  forment  ensemble une certaine cohérence culturelle.  On y représente  les symboles qui incarnent  cette cohérence de la société et un temps immobile qui échappe à l’histoire.  Ce réseau culturel symbolique qui structure la société est passablement détruit ou affecté en période de crise. Ces périodes tourmentées  constituent des crises symboliques et  l’homme social  a du mal à exprimer son existence.  Il s’agit alors  pour la société éclatée de retrouver un langage économique, social, politique, idéologique, spirituel, artistique …

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Au Togo, trois  maîtres de marionnettes,  Michel Koulekpato, Adama Bacco, Vicky Tsikplonou, avaient   retenu mon attention en 1999, 2000 et 2001 parce que les contacts et la riche correspondance que nous avons eus, m’ont permis quelques observations sur leur manière de respecter, d’utiliser ou de contourner le sacré et les secrets de la tradition. Comme Danaye Kanlanféï, tous ont parlé de la fonction du rêve dans leurs créations et ils m’ont transmis au total une cinquantaine de rêves qui concernent un autre travail plus approfondi sur le rêve et la création chez ces maîtres de marionnettes (Bednarz, 2003 : 125-167).

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L’on peut donc s’interroger sur le moteur de la création chez ces maîtres de marionnettes. Si presque tous parlent de la fonction du rêve dans leur création, la dimension onirique n’est pas systématique chez tous les artistes ni régulière chez le même créateur. Ils peuvent avoir à d’autres moments des approches différentes du même monde et ne plus sembler dépendre de cette part d’invention inconsciente qui est l’une des deux manières de créer.

 

Les contacts  extérieurs favorisés par l’ancrage des artistes togolais et burkinabés dans leur capitale (Lomé, Ouagadougou), et les voyages qu’ils font à l’occasion des tournées internationales, apportent d’autres connaissances, techniques, esthétiques qu’ils souhaitent incorporer à leur travail.

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D’une manière générale, les différents contacts esthétiques d’abord refusés au temps de la colonisation et maintenant demandés,  ont permis la reconnaissance d’un art oublié et son basculement de la pratique traditionnelle vers une pratique  spectaculaire.

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La société est encore présente sous la  forme du public. Si l’art de la marionnette ne transforme pas le destin des sociétés togolaises et burkinabé, il aide à l’amélioration de sa condition, à l’éducation morale, politique, médicale, sociale…Le créateur n’œuvre jamais seul et le milieu social qui l’a façonné s’inscrit dans son œuvre. Nos maîtres de marionnettes  comme les hommes de théâtre africains ne  sont pas  absents de ce désir de recréer à travers leurs expériences,  un acte social fort qui favorise la cohésion sociale.

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Parmi les multiples facettes de la marionnette, celle qu’elle réserve au public est aussi très riche. En dehors des émotions qu’elle crée, en symbiose avec son maître, elle fait naître chez les petits comme chez les grands, une participation à différents niveaux. Au Togo, un spectateur initié reconnaîtra facilement dans certaines marionnettes quelques génies, quelques ancêtres mythiques… qui le sensibiliseront aux racines des fléaux de la sécheresse, de la faim, de la maladie… et l’aideront à les combattre. Lorsque les compagnies parcourent le monde, elles   cherchent à montrer ces différents problèmes  aux spectateurs qui  ne reconnaîtront pas les éléments magico-religieux mais  seront surtout curieux et réjouis  par l’esthétique du spectacle.

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Ancrage traditionnel, pratiques nouvelles pour tous les marionnettistes ?

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Pour Hamadou Mandé, trois "figures emblématiques" ont accompli et continuent d'accomplir un travail de création et de transmission essentiel pour la génération actuelle : Yaya Coulibaly  au Mali,  Were-Were Liking en Côte d'Ivoire et Danalye Kalanféï au Togo dont on a pu suivre ici l'évolution des marionnettistes qui l'ont accompagnés. Mais pour lui, chez certains praticiens, dans d'autres pays, la pratique est complètement déconnectée de la tradition et souvent apprise grâce à des formateurs étrangers n'ayant aucun lien avec les pratiques traditionnelles.

 

Au Burkina Faso, nous avons voulu démontré la richesse de ces pratiques traditionnelles notamment autour des rites de la mort mais aussi au fil de la vie dans lesquels les marionnettistes pourraient davantage puiser ; pratiques traditionnelles riches qui, à bien des égards, rejoignent "la modernité occidentale" à travers  l'utilisation de l'objet, la pratique du  mime, de la magie, le mélange des disciplines artistiques...

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Nécessaire formation des marionnettistes, collaboration et diffusion 

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Beaucoup d'événements artistiques  dédiés à la marionnette ou pluridisciplinaires  sont soutenus par les politiques publiques qui contribuent au cours de ces moments à la formation, la création et la diffusion  de ce secteur culturel.

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Opportunités locales, nationales, internationales à travers de multiples organisations telles que l'UNIMA, les festivals FITMO, MASA, FITHEB traduisent une vitalité que les artistes doivent saisir.

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1] J. C. Froelich, Animismes, Paris : éd. de l’Orante, 1964, p. 29.

 

[2]  le haut et le bas sont construits sur le même modèle parce que,  comme le dit J. C. Froelich, « les Africains estiment que la société humaine n’est que le calque de l’ordre cosmique et mythologique…  »[2]. 

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Lire aussi Hamadou Mandé/Themaa/Manip 57 et 58
© Anita Bednarz 2020
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